Nigeria: La coopération entre les terroristes et les bandits, une autre source de problème
Au début décembre, les autorités nigérianes ont rouvert la voie ferrée entre Kaduna et Abuja, huit mois après l’attaque effectuée par les bandits locaux et les terroristes de Boko Haram. Une attaque qui a fait 10 morts en mars dernier et occasionné l’enlèvement de 170 personnes, finalement libérées contre rançon.
Ce n’était pas la première fois que l’organisation terroriste était liée aux bandits locaux dans une attaque conjointe.
Selon une publication de l’AFP, les responsables militaires nigérians avaient fait part de leurs soupçons concernant une telle coopération en 2021, lorsqu’on avait signalé que Boko Haram entraînait des bandits dans l’utilisation des canons anti-aériens, des explosifs et autres armes. La révélation de cette coopération terroristes- bandits a été confirmée par Lai Mohammed, ministre nigérian de l’Information, après un attentat perpétré contre les villages dans l’État du Plateau, qui a coûté la mort à plus de 150 personnes.
« Ce qui se passe maintenant, c’est qu’il existe une sorte de poignée de main contre nature entre les bandits et les insurgés de Boko Haram », a déclaré Lai Mohammed.
D’après certains rapports, les bandits sont surtout intéressés à s’enrichir et exploiter les lacunes de gouvernance, alors que Boko Haram cherche à établir le régime de la charia et un califat (état politico-religieux).
Toutefois, ces groupes pourraient avoir un intérêt commun : l’acquisition des armes pour commettre des crimes rémunérateurs ou poussés par l’idéologie et pour combattre les forces de sécurité du Nigeria.
Notons que très récemment, des bandits armés ont semé le chaos au Nord-Ouest du Nigeria, où ils sont essentiellement considérés comme des terroristes. Comme réplique, le gouvernement a adopté une approche militariste pour éliminer les bandits.
« La première chose à savoir sur le Nord-Ouest du Nigeria, c’est que la région possède l’un des plus hauts taux de pauvreté, d’inégalité et de chômage du pays. Vous ne pouvez donc pas ignorer les problèmes socio-économiques sous-jacents aux dépens de la poursuite d’une approche excessivement militariste », pense Folahanmi Aina, analyste et expert en sécurité.
En effet, les problèmes similaires entravent la lutte contre les extrémistes, qui apprennent à s’adapter à l’emploi de la force à la longue.
« Ils battent en retraite dans l’ombre et en sortent à nouveau lorsqu’ils ont eu la chance de se rétablir. Et aussi de remplacer les membres qu’ils ont perdus par de nouvelles recrues issues de la même société. Mais si vous affrontez ces problèmes socio-économiques, il y a moins de motivation pour que quelqu’un qui a un emploi normal quitte cet emploi et rejoigne une cause djihadiste », précise t-il.
À mesure que l’extrémisme monte en flèche dans le Nord-Ouest du Nigeria, les observateurs craignent que la région ne devienne bientôt un « pont terrestre » connectant les insurrections islamistes de la région centrale du Sahel à celle qui sévit depuis une dizaine d’années dans la région du lac Tchad au Nord-Est du Nigeria, indique un rapport publié par The International Crisis Group.
Bien qu’il n’existe pas de moyen simple pour empêcher les extrémistes de s’associer aux bandits, le Dr Aina interpelle le gouvernement du Nigeria à «agir promptement pour faire face aux causes fondamentales de la crise de longue date entre les fermiers et les pastoraux du pays, laquelle contribue à la prolifération des armes dans la région».
Pour lui: « La mauvaise gouvernance doit être remplacée par une gouvernance axée sur le peuple, étant donné que la première a contribué à l’émergence du djihadisme et du “banditisme” au Nigeria. »